Chaque année au mois de juin, lors de la transhumance et l’arrivée des troupeaux à l’Espérou, mes oreilles attendent avec impatience de retrouver ce bruit incessant et tellement typique des cloches nommées sonnailles, pendues au cou des ovins !
Ma curiosité l’emporte : à quoi correspondent les gravures et les initiales sur les colliers, pourquoi des pompons colorés sont-ils placés sur certaines brebis ? Je décide de mener mon enquête…
Les colliers de bois, uniques ! Toutes les bêtes qui peuvent porter une cloche sont ensonnaillées. Pour la circonstance, les dralhaus, grosses clapes de transhumance, sont placées sur les bêtes les plus fortes. Les colliers ronds en bois sont décorés : peints, ciselés et parfois gravés aux initiales des propriétaires. L'effet est magique : dans la montagne, on entend le troupeau plusieurs heures avant son arrivée.
Les sonnailles : de la plus petite à la plus grosse. La clapette de base, la clape de prime, la clape de draille et enfin, la plus dodue, la sonnaille de transhumance. D’environ 10 à 20 cm, elles rythment la marche des brebis.
Les décorations : coiffeurs à domicile. Une partie des bêtes est tondue aux ciseaux pour réaliser des vagues et une touffe sur la croupe, la rose, coloriées avec une préparation particulière de terre spéciale et d'ocre.
Les pompons, la touche finale ! La tradition veut qu'une partie des bêtes, les moutons castrés ou les brebis avec lesquelles l'éleveur entretient des liens particuliers, portent des pompons : « Les pompons, au départ, on ne sait pas. On laisse partir les vieux et après on décide ». Les pompons sont mis en même temps que les cloches de draille. Les anciens bergers prêtent des cloches et leurs colliers pour qu'elles continuent à vivre leur vie. Selon une hypothèse, cette tradition remonte à la fin de la guerre 14-18. Un berger revenu du front aurait mis le pompon de son béret sur une brebis. La mémoire a oublié comment ce soldat a été imité, comment le phénomène s'est amplifié, généralisé, pour devenir une tradition.
Merci à tous ceux qui perpétuent cette tradition qui apporte des sons et des couleurs dans les Cévennes et nous permet de ressentir la magie de la transhumance !
Une mention spéciale à Laurent Cabiron, Francis Couderc, Jean-Paul Loriol et la famille Moulière qui ont contribué à combler mes lacunes sur les sonnailles…
Photos : www.sonnailles.net